GI-ESCR

View Original

L’ONU s’inquiète de la « privatisation » de l’enseignement au Maroc

English version here

(Rabat, 14 avril 2015) Le Comité des Droits Economiques Sociaux et Culturels de l’Organisation des Nations Unies (CDESC) a récemment publié un document faisant état d’une liste de points (questions) pour le Maroc, auxquels le gouvernement doit répondre par écrit dans les prochains mois.

Les questions soulevées par le CDESC font directement échos à un rapport alternatif  sur la problématique de la privatisation de l’enseignement au Maroc soumis au Comité par un groupe d’organisations marocaines et internationales en décembre 2014. C’est la première fois qu’un Comité de l’ONU qualifie directement la situation de l’enseignement marocain de « privatisation ».

Au paragraphe 25 de la liste de points, le CDESC demande au Maroc  de « fournir des renseignements sur la mise en place d’écoles privées et sur l’impact que la privatisation aurait  sur le système éducatif, en particulier pour prévenir la déperdition scolaire, les inégalités dans l’accès à l’éducation et assurer la pleine application du principe de l’enseignement primaire obligatoire et gratuit pour tous ». Le Comité s’inquiète dans le même temps de l’état de l’enseignement public, et demande au gouvernement marocain de « donner des renseignements sur les mesures prises pour améliorer la qualité de l’enseignement public, y compris dans le secteur de l’enseignement préscolaire ».

Le collectif d’organisations, qui regroupe la Coalition Marocaine pour l’Education Pour Tous, la Fédération Nationale des Associations de Parents d’Elèves du Maroc, la Global Initiative for Economic Social and Cultural Rights, le Mouvement Anfass Démocratiques, Bayti, l’Union des Etudiants pour le Changement du Système Educatif, Zaynoo pour l'Egalité des chances, ainsi qu’ATTAC Maroc, a révélé avec une grande inquiétude dans son rapport parallèle les discriminations dans l’éducation générées par la croissance anarchique de l’enseignement privé au Maroc , ainsi que les risques qu’engendrerait pour les droits de l’Homme, et plus particulièrement pour le droit à l’éducation, l’adoption de partenariats public-privé (PPP) dans l’éducation.

Le collectif d’organisations s’inquiète notamment que le Maroc s’inspire des PPP tels qu’ils ont été développés au Chili, alors que le système éducatif chilien est un des plus inégalitaires au monde. Le système chilien a été un échec au point que le Comité des droits de l’enfant a récemment souligné la « ségrégation » que cause ce système, et le Chili est en lui-même train de revenir sur ce système de PPP pour redévelopper un système éducatif public fort, seul à même d’assurer une éducation de qualité pour tous.

Cette interpellation du Maroc par le CDESC fait suite à des recommandations similaires du Comité des droits de l’Enfant de l’Organisation des Nations Unies de septembre 2014. Sur la base d’un travail de recherche d’un groupe d’organisations, cet autre comité d’experts de l’ONU avait dénoncé le développement incontrôlé de l’enseignement privé au Maroc, notant qu’il avait conduit « au renforcement des inégalités dans la jouissance du droit à l’éducation ».

Se félicitant de cette avancée  et de la prise en compte de ses observations par le Comité, le Collectif :

  • demande au gouvernement de répondre de manière précise et transparente aux questions qui lui ont été soumises par le CDESC ;

  • réaffirme sa disponibilité à contribuer à la réflexion sur la réforme du système éducatif ;

  • s’apprête à mener une campagne de plaidoyer autour de la problématique de la privatisation de l’enseignement au Maroc ;

  • appelle tous les défenseurs du droit à l’éducation de rallier sa dynamique.

Documents

Contacts

Sylvain Aubry, Right to Education Researcher, Global Initiative for Economic, Social and Cultural Rightssylvain@globalinitiative-escr.org

Mohammed Qnouch, Président, Fédération Nationale des Associations de Parents d’Elèves du Maroc ( FNAPEM) fnapem@gmail.com

Ahmed Sehouate, Président, Coalition Marocaine pour l’Education pour Tous sehouate@yahoo.fr

Yamna Taltit, Responsable Formation&Expertise Association BAYTI t.yamnabayti@gmail.com